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2 novembre 2014 7 02 /11 /novembre /2014 09:30

d'après PÉTITION D’UN VIVEUR MALGRÉ LUI de Maupassant

Monsieur le Président :

Mes cheveux blancs m’autorisent à protester

Contre vos jugements. La partialité

De vos décisions

Pousse toujours votre juridiction

À acquitter les femmes dans les affaires d’amour

Dont vous êtes saisi chaque jour.

On a eu pour moi

Bien des… faiblesses, quoique je sois

Indécis, et hésitant.

Je suis si timide que jamais

Je n’aurais osé…ce que vous savez,

Si, pour moi, les femmes n’avaient osé si souvent.

J’ai ainsi compris que neuf fois sur dix,

C’est l’homme qui est capté, séduit,

Lui, le séducteur

Que vous flétrissez. Il est la proie.

La femme est le chasseur.

Écoutez-moi :

Quand j’étais jeune officier,

J’allais souvent au bal danser.

Un soir, une femme mariée m’a remarqué.

Sa provocation me troublait.

Elle m’aima,

S’abandonna

Et ne voulut plus me quitter.

Comme mon régiment allait être déplacé

Je me crus sauvé,

Délivré !

Mais un soir, je la vis entrer

Au mess des officiers :

-« Comme tu vas partir,

Je viens t’offrir

Toute ma vie. Je te suis.

Pour toi, j’abandonne mon mari. »

-« N’essaye pas de me suivre. Je ne veux pas. »

-« Serais-tu de ceux qui

Séduisent une femme, puis

L’abandonnent ? C’est infâme. »

Elle se leva et s’en alla.

Le lendemain, j’apprenais

Qu’elle avait tenté de s’empoisonner.

Une de ses amies m’a prévenu

Qu’elle était condamnée, perdue,

Et que, seule, une promesse d’amour pouvait

La sauver.

Je promis.

Je l’enlevai et quittai l’armée. Elle guérit.

Pendant deux ans, nous vécûmes en Italie.

Or, un matin, le mari

Vint chercher sa femme,

Non pour lui

Mais pour ses enfants. Nous implorions la dame

Moi, pour qu’elle me quittât,

Lui, pour qu’elle rentrât

Mais elle, refusa.

Le mari me salua et prononça :

’’Je vous plains, mon bon’’

Elle mourut six mois après.

Pour tous, je l’avais déshonorée.

Je l’avais tuée.

Et…votre collègue, Président, m’a condamné.

Je termine. Regardez les rues de Paris

En fin d’après-midi.

Voyez ces petites en cheveux,

Déambulant deux par deux,

Cherchant l’amour partout,

Provocantes,

Prêtes à accepter tout rendez-vous,

Ce sont vos clientes.

Écoutez-les causer :

’’ Oh moi, si j’ai la chance de trouver

Un garçon riche, je te promets

Qu’il ne me lâchera pas comme Edmée

Sinon, gare au vitriol ! ’’

Si un homme passe, elles le racolent.

Il s’arrête.

Une des jolies filles est prête !

L’homme cède. Vous le condamnez

Un mois plus tard, elle l’a abandonné.

Dites-moi lequel est le limier,

Et lequel est le gibier ?

Président, n’oubliez point ceci :

L’amour est toute leur vie.

Elles jouent

Avec nous

Comme les chats avec les souris.

Les jeunes filles cherchent un mari.

Celles qui quêtent des amants

Les veulent similairement.

Quand un homme s’échappe de leurs mains,

Elles se vengent bien

Comme on tue d’un coup de fusil

Le lapin échappé du lacet.

Tel est mon humble avis.

Je vous le soumets.

Monsieur le Président,

Veuillez agréer mes meilleurs sentiments.

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