~~L’ÂNE
Qu'ils chassent ou qu'ils braconnent, Meillat et Chicot sont deux ravageurs.
-« Qué plomb t’ as pris, Chicot ? »
-« Du neuf »
Il épaula, tira. Un petit lapin gris s’effondra.
En chemin, Meillat et Chicot Virent un pauvre hère Tirant un vieux bourricot. Ils l’interpelèrent :
-« Ton bourri, Oùsque tu l’ conduis ? »
-« J’ va chez Louis Pou’ l’ faire abattre. I’ n’ vaut pus rien. »
-« Y t’en donnera, combien ? »
-« P’t-être cent sous. J’ sais ti ? »
-« J’ t’en donne cent-vingt. »
-« C’est dit. »
-« Tu vas voir c’ qu’on fait d’ c’te machin ! » Dit Chicot à Meillat. Il tira. L’âne s’éffondra.
-« Eh ben, on en fait quoi à c’t’ heure ? »
-« Couchons-le dans l’ bateau. Aies pas peur, J’allons ben rigoler chez Dédé ! »
Les rôdeurs embarquèrent le baudet Sur leur canot à demi pourri Et se mirent à ramer, direction Paris.
-« Allons livrer l’ lapin à Dédé, Not’ copain tavernier ! En route, on cach’ra l’âne dans un fourré. » Chicot s’était mis en tête de susciter L’intérêt mercantile du bistrotier Pour leur très gros gibier. Meillat parla le premier : -« J’étions embusqué à L’Empierré Quand quéque chose, de derrière un buisson, Nous passe devant. Chicot a tiré. Ça tombe. Et vu les gardes, j’ filons. J’ peux pas t’ dire c’ que c’est, Mais, pour du gros, c’est du gros. »
Palpitant, Dédé demanda à Chicot : -« C’est-i’ pas un chevreuil ? »
-« Ça s’ peut. »
-« Pourquoi, sacrebleu, Vous m’ l’avez pas amené ? »
-« Parce que j’ vendons sur place, désormais ! J’ai preneur pour vingt francs. Tu comprends ? » Le gargotier leur offrit vingt-cinq francs.
Et les deux braconniers empochèrent l’argent !