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28 mai 2014 3 28 /05 /mai /2014 06:18

VAINS CONSEILS (d'après Maupassant)

 

Mon cher ami,

 

Tu m’écris

Pour me demander

Un conseil que je ne saurais donner.

 

Mon vieux Simon,

Tu as donc une liaison

…Que tu voudrais dénouer,

Mais Elle ne veut pas abdiquer.

Ah ! Il est bien rare, de nos jours,

Que la Femme renonce à l’amour !

 

Comment pourrais-tu

T’en débarrasser, me demandes-tu ?

Si Elle est encore désirable,

Tu peux t’en débarrasser

…Au détriment d’un ami charitable.

 

Je te conseillerais bien le poison

Mais…tu n’échapperais pas à la prison

…À perpétuité !

 

Pour rompre, il n’existe en réalité

Qu’un seul procédé :

Tu disparais et ne reparais jamais.

Elle t’écrit, tu ne réponds pas ;

En aucun cas.

Elle vient te visiter,

Tu as déménagé.

Elle te recherche partout,

Tu demeures introuvable. C’est tout !

Si tu La rencontres par hasard,

Prends l’air de ne pas la reconnaitre,

Et en vitesse, pars !

File en traître !

Si Elle t’arrête,

Tu Lui demandes tout net :

« Mademoiselle, …vous voulez ?

Ce moyen est néanmoins mal élevé.

 

Ou bien : trouve-toi

Seul enfermé avec Elle et fais-toi

Surprendre en flagrant délit

Par son mari.

…Tu seras quitte, mon cher Simon,

Pour deux mois de prison !

 

Tu peux te brûler la cervelle,

Te faire tuer dans un duel.

Tu pourrais aussi…te marier !

Mais ne tomberais-tu pas,

Dans ce cas, de Charybde en Scylla ?

Bref, tu ne serais pas délivré !

 

Tu pourrais La rendre maman

…S’il est encore temps !

Elle t’en voudra

Et vraisemblablement se sauvera…

 

Au lycée,

On t’a enseigné

Le grec et le latin

…Qui ne t’ont pas rendu plus malin.

Mais on ne t’a pas appris

À te défendre des femmes qui sont

Le plus grand danger de notre vie.

À l’école, on devrait

Donner des leçons

Permettant de révéler leurs menteries,

Leurs ruses et mille autres choses sur elles.

 

En fait, il conviendrait

De nous mettre en garde contre Elles.

Voici deux choses qu’on devrait enseigner

Aux enfants en même temps que l’alphabet :

-Ne pas prendre une maîtresse si elle

Ne peut plus nous être infidèle.

-Se garder des liaisons qu’on ne peut dénouer

Par quelques billets.

 

Celui qui écrirait un manuel

Sur l’art de se séparer d’Elle

Nous rendrait plus de services que l’inventeur

Du train à vapeur !

 

Mon cher Simon,

Je t’ai fait un long sermon

Mais je m’aperçois en somme

Que je ne te donne

Aucun moyen pratique.

 

                        Ton ami, Patrick.

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27 mai 2014 2 27 /05 /mai /2014 08:11

UNE VENTE (d'après Maupassant)

 

Les nommés Caron Césaire

Et Cornu Prosper

Comparaissaient devant le juge de paix.

Ils étaient inculpés

De tentative d’assassinat

Par immersion

Sur Marie Brument, femme Caron.

 

Prosper Cornu, petit, gros, court de bras,

La tête plantée sur le torse, sans cou,

Est éleveur de porcs à Chanteloup.

 

Césaire Caron, maigre sous sa biaude bleue,

Montre un visage usé, affreux.

 

Marie Caron, assise au banc des témoins,

Reste dans son coin,

Mains croisées sur les genoux,

Impavide,

L’air endormi et stupide.

 

LE PRÉSIDENT :

-« Femme Caron, Dites-nous.

Le détail des faits. »

 

MME CARON :

-« Ces deux-là m’guettaient. »

 

Césaire l’interrompit : -« J’étais bu. »

Et Prosper,

Se tournant vers son compère,

Ajouta : -« Eh ! Tous deux, j’étions bus ! »

 

LE PRÉSIDENT :

 -« Femme Caron

Continuez votre déposition. »

 

MME CARON :

-« V’là Césaire qui m’dit :

‘’-Veux-tu gagner cent sous ?’’

‘’-Oui’’, que j’ dis.

‘’-Ben, va remplir l’ baril qu’est dans la soue.’’

Pendant qu’ j’apportais d’ l’eau

Avec mon sieau,

Eux, i’ buvaient un coup

Et pi encore un coup.

Y a Césaire qui m’ dit : ‘’-Te tracasses pas.

Va ton train ; ton tour viendra.’’

J’ m’occupais point de c’ propos, mé,

Vu qu’il était bu.

 

Quand l’baril fut plein rasibus,

J’ dis : ‘’-C’est fait.’’

Cornu m’ donne cent sous.

 

Puis Césaire a ajouté :

‘’-Veux-tu encore gagner cent sous ? ‘’

‘’-Oui’’, que j’ dis.

Alors, i’ m’ dit :

‘’-Débille-té.’’

J’ôte ma jupe, mon caraco,

Pis ma coiffe et mes sabots.

‘’-Garde ta ch’mise et tes bas,

J’ sommes bons enfants’’,

M’dit Césaire tout bas.

 

Me v’là comme not’ mère Ève quasiment.

Eux, ils m’ piquent dans l’ieau.

J’ai eu une glaçure dans les boyaux.

Cornu m’ pousse la tête pou’ m’ néyer.

L’ieau m’ faufilait dans l’ nez.

J’ voyais déjà l’ Paradis.

 

Et eux, i’ s’servaient deux fil-en-dix ! 

Pi, i’ sont tapé

Comme des béliers. »

 

Mme Caron

Ayant fini sa déposition,

Le président annonça : -« Prévenu

Cornu,

Vous paraissez l’instigateur

De cette machination d’horreur.

Veuillez vous expliquer. »

 

-« Caron m’avait demandé :

‘‘Avant jeudi, i’ m’ faut mille francs.

Alors, ma femme, j’ te la vends.’’

Moi, Cornu, j’ suis veuf et j’étais bu ;

Vous comprenez, ça m’ remue.

-‘’Combien ça, tu m’ la vends ?’’

Caron  réfléchit ou fait semblant :

 

‘’J’ te la vends

Pour un mètre cube d’eau, soit mille francs.’’

-‘’Mais comment vas-tu litrer

Sauf, si dans l’eau, tu la mets ?’’

Alors, il m’explique son idée,

Pas sans peine, vu qu’il était bu :

-‘’J’emplis d’eau un gros baril, rasibus

Et d’dans, j’ la mets.

Tout liquide qui sortira,

On l’ mesurera.’’

 

Je lui dis :

-‘’C’est vu, c’est compris.

Mais c’t’ eau qui sortira,

A coulera. Comment tu f’ras ?’’

-‘’Tout c’qu’on r’mettra d’eau,

Ça f’ra la mesure. Si j’ mets dix seaux,

Ça f’ra

Un mètre-cube, voilà.’’

 

Bref, v’là la suite :

Quand j’allons mesurer le déficit :

…Pas quatre seaux !

Oh ! Oh ! Oh !

Caron déclare :‘’ C’est pas assez.’’ Je’gueule.

Il gueule, je surgueule.

Il tape. Je cogne. Ça dure autant

Que le Dernier Jugement.

Arrivent alors les gendarmes Dupuis et Gerson.

Ils nous sacréandent. Direction la prison !

 

Le jury consterné

Se retira pour délibérer.

 

Au bout d’une heure, les jurés sont revenus

…Et acquittèrent les prévenus

Mais avec de sévères considérants,

Appuyés sur la majesté du mariage

Et établissant

La délimitation

Des commerciales transactions.

 

Les Caron se retirèrent, en bon ménage.

Et Cornu est retourné

Chez lui, d’un pas pressé.

 

 

 

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26 mai 2014 1 26 /05 /mai /2014 07:10

LE PETIT FÛT (d'après Maupassant)

 

Ce matin-là, André Gambille,

L’aubergiste d’Épreville

Pénétrait dans la ferme

De la mère Delerme.

 

Comme il possédait un bien attenant

Aux terres de la vieille, il convoitait

Sa ferme depuis longtemps.

Vingt fois il avait essayé de l’acheter

Mais la mère Delerme s’y refusait :

-« J’y sieus née, j’y mourrai. »

Malgré ses quatre-vingt-cinq ans,

Elle était infatigable.

 

Un jour, Gambille, en entrant,

Lui fit dans le dos une tape amicale :

-« Eh bien ! La mère, c’te santé ? »

-« Pas trop mal. Et vous, André ? »

-« Eh ! Quéques douleurs ; sans ça, tout va. »

-« Allons, tant mieux si ça va ! »

-«Vot’ ferme, vous m’la vendez oui ou non ? » 

-« N’y r’venez pas. C’est non. »

-« C’est qu’j’ai trouvé un arrangement

Qui f’rait not’ affaire à tous deux. »

-«  Qué qu’c’est donc, mon Dieu ? »

-« Le v’là : vous m’la vendez

Et tout d’même temps

Vous la gardez.

 

Suivez mon raisonnement.

J’vous donne chaque mois six cent francs

Pour vous, i’ n’y aura rien d’ changé

Vous n’ faites que prendre mon argent.

Ça vous va, la mé ? »

-« Je n’ dis pas. Seulement, j’y réfléchis.

R’venez m’ voir samedi. »

-« Si vous étiez d’accord, on f’rait

Un papier notarié.

Puisque vous avez point d’éfants,

Vous gardez vot’ bien, vot’ vie durant

Et après, j’en prendrai possession. »

-« Là-d’sus, j’ veux m’ faire une raison. »

 

Le samedi suivant, la mère Delerme signa

Le contrat.

Cependant, trois années après,

La vieille se portait encore parfaitement.

Gambille se désespérait.

Se sentant

Trompé, floué, ruiné,

Ne sachant plus que faire,

Il se rendit chez la fermière

Avec le désir de l’assassiner.

 

Mais en chemin il eut une autre idée :

L’inviter à diner

Et lui faire boire fine, surfine, et fil-en-dix.

-« Ça, c’est du lait ; mé, j’en bois dix.

T’nez, pisqu’elle vous plait,

J’ vas vous en donner un p’tit fût.

Vous pourrez en boire sans retenue.

Y a rien de meilleur pour la santé. »

 

Le surlendemain, Gambille

Alla de nouveau chez la rentière.

-« Vous m’offrirez ben un verre de fil ! »

…Et trois ou quatre fois, ils trinquèrent.

Bientôt courût le bruit dans la contrée

Que la mère Delerme s’ivrognait.

On la ramassait dans son salon,

Dans sa cuisine, dans sa cour,

Ou dans un chemin des environs.

Gambille évitait de retourner chez elle et disait :

-« Ça finira par lui jouer un mauvais tour. »

 

Elle devait décéder

L’hiver suivant.

Gambille hérita

Et déclara :

-« Si elle n’avait pas été tant boissonnée,

Elle aurait encore vécu dix ans. »

 

 

 


 

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25 mai 2014 7 25 /05 /mai /2014 07:28

LA PATRONNE (d'après Maupassant)

 

J’étais à Paris étudiant en droit

Et logeais dans une pension sévère

Que mes parents réglaient chaque mois.

La patronne de mon logis avait l’air

D’un capitaine commandant un paquebot.

 

D’une voix forte,

Très forte,

Cette femme décidait tout d’un mot

Mais elle me soignait comme une mère,

Mieux qu’une mère.

Elle entrait souvent

Dans mon appartement,

Pour vérifier si mon lit était fait

Et  mes habits correctement brossés.

Elle devait avoir quarante ans environ.

 

Moi, n’ayant jamais quitté le Pays Normand,

J’avais décidé de vivre joyeusement

Et de toutes les façons !

Je lui déclarai que je voulais rentrer

À l’heure qui me plairait.

-«Vous ne devez pas trainer toute la nuit.

Il est interdit de rentrer après minuit. »

-« Madame, d’après la loi,

Vous êtes tenue de m’ouvrir à toute heure.

Si vous refusez, j’irai coucher ailleurs

Et à vos frais. C’est mon droit. »

 

Je dus lui faire impression

Car, depuis, elle me traita

Avec une faveur marquée.

Elle avait pour moi des attentions,

Des petits soins, des délicatesses

Et même une certaine tendresse

Qui ne me déplaisait pas.

Quelquefois, pendant les repas,

Par surprise, je l’embrassais…

Rien que pour la gifle qu’elle me lançait !

 

Mais voilà

Que je fis la connaissance

D’Emma,

Une belle étudiante en sciences.

 

Comme la patronne se couchait à dix heures,

Je la fis venir à la pension

À onze heures.

J’ouvris la porte avec précaution

Et nous montâmes l’escalier

Sur la pointe des pieds.

 

Puis je devins pressant.

J’enlevais un à un ses vêtements.

Emma cédait, mais résistait un peu,

Retardant l’instant fatal et délicieux.

 

Elle n’avait plus sur elle qu’un jupon

Quand tout à coup ma porte s’ouvrit.

Entrait la patronne de la pension

…Dans la même tenue qu’Emma :

-« Je ne veux pas de fille ici ! »

-« Mademoiselle n’est qu’une amie.

Elle venait prendre le thé. »

-« On ne se met pas dans cette tenue

Pour prendre une tasse de thé.

Chassez-moi cette fille des rues ! »

 

Emma se rhabilla et affolée,

S’élança dans l’escalier.

Je l’ai rattrapée en bas

Et la retint par le bras

Mais elle me repoussa :

-« Laissez-moi…Ne me touchez pas ! »

 

Je remontais, penaud, désemparé.

La chambre de la patronne était ouverte :

-« J’ai à vous parler, entrez ! »

Je m’arrêtais devant elle, en baissant la tête.

 

Elle avait croisé les bras sur sa poitrine

Que couvrait mal une chemise de soie fine.

-« Je ne veux pas de filles chez moi,

Comprenez-vous ?

Je ferai respecter mon toit.

Entendez-vous ? »

Accumulant les indignations,

Elle m’accablait

Sous l’honorabilité de sa maison

Et me lardait

De reproches mordants.

 

Au lieu de l’écouter,

Je la regardais,

N’entendant

Plus un mot,

Mais plus un mot…

Je voyais son admirable poitrine,

Et sa lèvre me parut mutine.

Je n’aurais pas

Imaginé qu’il y eut des appâts

Aussi appétissants

Sous un si léger vêtement.

 

Elle semblait rajeunie de dix ans

En son déshabillé !

Et voilà que, bizarrement,

…Je me suis senti tout remué.

Je retrouvais

La situation précédente

…Et presqu’aussi tentante !

J’ai regardé son lit.

Hum ! Ce lit !

Il devait faire là aussi

Bon que dans un autre lit.

Quoi de plus troublant qu’un lit défait ?

Celui-là me grisait.

La patronne maintenant

Me parlait doucement

Comme si elle allait m’accorder son pardon.

-« Voyons…, voyons… »

 

Je la saisis

Et me mis

À l’embrasser, mais à l’embrasser !

Elle se débattait…sans se fâcher.

Et dix fois répéta :

-« Oh ! La canaille…la canaille…la ca… »

Elle ne put achever. Je l’avais enlevée

Et l’emportais.

Je rencontrai le bord du lit.

J’y suis tombé… sans la lâcher…

 

Il y faisait fort bon dans ce lit.

Une heure après,

Glissée à mon côté,

Contente

Et reconnaissante

Elle gazouillait comme une caille :

-« Oh !...la canaille !...la canaille !... »

 

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22 mai 2014 4 22 /05 /mai /2014 08:42

 

Sous une ère,

Précédente

Mais triomphante,

La qualité première 

Du patron,

Était de se montrer bon

Gestionnaire.

Fallait que l’usine prospère

Sinon

La carrière du patron

Tombait à l’eau

Le portail de la sortie

Etait grand’ ouvert. Pas de cadeau.

Pas même un merci.

 

C’était l’bon temps !

 

Aujourd’hui, le bon président

Se reconnaît

S’il sait licencier,

Délocaliser,

Enrichir ses actionnaires

Et devenir vite fait

Milliardaire.

 

Alors on l’honore,

On le décore.

Du reste, il s’en fiche,

Le big chief.

 

Aujourd’hui, un président

Incapable

Se défendra en disant :

-« C’est pas ma faute.

J’ai tout essayé, jusqu’au bout.

C’est la conjoncture qu’est pas favorable. »

 

Malgré tout.

Le big chief garde une bonne cote.

Il dort

Sur ses deux oreilles.

On lui paie

Des indemnités du tonnerre

En numéraire.

Il reçoit un parachute

Rempli d’or !

Plus douce sera sa chute.

 

En bon français prudent

Le président

A pris aussi

Le soin de planquer

Sur un compte secret

Son argent en Helvétie

 

Et puis dans trois

Mois,

Via la camarilla,

Il rebondira, l’infâme,

Sans aucun état d’âme.

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21 mai 2014 3 21 /05 /mai /2014 07:54

 

LE PROTECTEUR (d'après Maupassant)

 

Fils d’un huissier, Jean Marin

Faisait son droit au quartier Latin.

Dans les différentes brasseries

Qu’il fréquentait, il était devenu l’ami

De nombreux étudiants de la Faculté.

 

Six années plus tard, l’un d’eux fut élu député.

Marin devint son chien fidèle,

Celui qui fait les corvées

Et les démarches inusuelles.

Ce député fut nommé ministre. Un mois après,

Marin, qui était avocat,

Siégeait au Conseiller d’État.

 

Dès lors, il avait plaisir à se montrer.

Il disait aux marchands chez qui il entrait :

-« Je suis Conseiller d’État…

Si vous avez un problème délicat,

Alertez-moi, je peux vous être utile.

 

Des lettres de recommandation,

Il en écrivait des milles.

 

Il offrait son appui avec générosité.

Quand il rencontrait une relation,

Il s’informait de sa santé.

Puis, sans attendre, il déclarait :

-« Je suis Conseiller d’État, vous savez.

Dans ma position,

On a le bras long.

Si vous êtes, un jour, dans l’embarras,

Ayez recours à moi. N’hésitez pas.

 

Un matin qu’il se rendait au Conseil d’État,

Il pleuvait dru.

Il héla un fiacre qui ne s’arrêta pas.

Il s’en fut donc à pied par les rues.

 

Un vieux prêtre marchait devant lui.

Il l’abrita sous son parapluie :

-« Je suis Conseiller d’État.

Je me rends au Conseil d’État.

Où allez-vous, monsieur l’abbé ? »

Le curé semblait hésiter :

-« Je vous remercie.

Je vais par là aussi. »

-« Vous venez à Paris pour vous distraire ? »

-« Non. J’ai une démarche à faire.

Une petite difficulté avec…

Avec mon évêque. »

-« Mais justement, c’est le Conseil d’État

Qui règle ses choses-là.

Usez de moi, dans ce cas. »

 

-« Vous êtes trop bon ;

Je vais en effet au Conseil d’État.

J’ai à voir MM Giroud et Savon

Et peut-être aussi M. Petitpas. »

Marin l’arrêta :

-« Mais ce sont des amis,

Mes meilleurs amis,

Des collègues excellents,

Des gens charmants.

Je vais vous recommander à tous les trois

Et chaudement.

Comptez sur moi. »

 

Le curé se confondit en remerciements.

Marin était aux anges :

-« Ah ! Vous avez une fière chance,

Monsieur l’abbé. Vous allez voir,

Votre affaire va se régler grâce à moi.

Vous allez voir.

Comptez sur moi. »

 

Au Conseil d’État, Marin menait

Le prêtre dans son cabinet

Et rédigea ces trois mêmes lettres :

 

Mon cher collègue, permettez-moi

De vous recommander un vénérable prêtre,

Des plus méritants, M. l’abbé…

Il s’interrompit pour lui demander :

-« Votre nom…? »

-« Abbé Dormoy. »

Dormoy qui a besoin de votre intervention

Pour régler

Une affaire dont il va vous parler.

Mon cher collègue, je vous prie…

 

Quand il eut écrit

Les trois lettres,

Il les remit au prêtre

Qui le remercia chaudement

Et prit congé, tout content

 

Besogne accomplie,

Marin rentra chez lui, dormit en paix,

Se réveilla tout à fait reposé.

Il se fit apporter le journal, l’ouvrit

Et lut avec émoi :

 

Un prêtre nommé Dormoy,

Ayant conspiré

Contre le gouvernement, a été appelé

Au Conseil d’État

Pour s’expliquer.

Par ailleurs, il vient d’être cassé

Par son évêque, Mgr Costa.

 

Or, hier matin

Il a trouvé un ardent défenseur,

En la personne du Conseiller Marin,

Qui a donné à ce malfaiteur

Les appuis les plus pressants

Auprès de trois collègues du Conseil d’État.

L’attitude inqualifiable, et cetera

Marin se précipita chez Giroud

Qui lui dit vertement

-« Vous êtes fou

De me recommander

Un tel conspirateur.»

-« J’ai été trompé…

Il n’avait pas l’air d’un comploteur.

Il m’a indignement joué.

Faites-le condamner sévèrement,

Très sévèrement.

Je vais écrire…

Dites-moi à qui dois-je écrire

Pour le faire condamner.

J’irai trouver

Le Procureur et l’Archevêque.

Oui, l’Archevêque… »

 

Et tout d’un coup,

Marin s’assit devant le bureau de Giroud,

Et écrivit : Monseigneur, j’ai l’honneur

D’informer votre Grandeur

Que je viens d’être victime de la fausseté

Et des mensonges d’un certain abbé…

 

Puis se tournant vers Giroud, il lui dit :

-« Mon cher ami,

Que cela vous serve de leçon.

Ne faites jamais de recommandation ! »

 


 

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21 mai 2014 3 21 /05 /mai /2014 07:51

 

 

 

Chopin,

Divin.

Mahler,

Malheur.

 

*Le hokku est un poème japonais de 3 vers et le tokka, de 5 vers.

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21 mai 2014 3 21 /05 /mai /2014 07:47

 

 

Au fond

En France,

Le seul problème de fond

C’est le manque de fonds.

Pas de chance !

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20 mai 2014 2 20 /05 /mai /2014 08:55

NOTES D’UN VOYAGEUR (d'après Maupassant)

 

Le train s’enfonce dans la nuit, haletant,

Éclairant murs, haies, bois, champs.

Dans le compartiment, en face de moi

Une dame et un monsieur à grosse voix.

À ma gauche, un bossu tient le coin.

À droite, un jeune ménage ou du moins

Un jeune couple. Sont-ils mariés légalement ?

La femme est blonde et lui, roux ardent.

 

Dès le début du voyage,

La dame dévisage

Le jeune d’un air joyeux.

Le monsieur à grosse voix ferme les yeux.

Le bossu se tient comme un paquet

Jeté sur la banquette.

Le monsieur à grosse voix semble inquiet.

Je fais semblant de dormir et je guette.

Les jeunes gens demeurent sans parler.

 

Neuf heures. La dame penche la tête.

Elle dort. C’est fait.

Le bossu ronfle comme une toupie.

À mon tour, je m’assoupis

Mais de temps en temps, je me réveille.

 

Nous arrivons à Marseille

Les jeunes gens sont enlacés.

Vingt-six minutes d’arrêt.

Je vais m’asseoir à la buvette et déjeune.

 

Quand je reviens, nous avons le bossu en moins

Et deux vieux en plus, dans les coins.

Nous repartons.

 

Les ménages, l’ancien et le jeune,

Déballent des provisions.

Poulet par-ci, veau froid par-là, sel, poivre,

Cornichons dans un mouchoir…

Tout ce qui peut vous dégouter

Des nourritures pour l’éternité !

 

Je ne sais rien de plus inconvenant

Que de manger dans un compartiment

Où se trouvent d’autres voyageurs.

Vous avez le tabac en horreur,

…Et votre voisin de banquette

Fume cigarettes sur cigarettes !

 

Rendez à ces goujats la monnaie

De leur grossièreté.

Livrez-vous aux plus gênantes excentricités :

Mettez-vous à chanter, à hurler,

Sifflez si vous voulez, retirez vos souliers,

Coupez-vous les ongles des pieds,

Crachez les pépins

De votre melon ou ceux du raisin

Mangez de l’ail,

Renversez votre chope de bière

Bafrez comme un cochon vos mangeailles

Pour montrer à ces malappris

Ce qu’il convient de ne pas faire.

 

Nous suivons la mer bleu-gris.

Le soleil inonde ces villes si belles :

Hyères, Cannes, Saint-Raphaël…

Sur son rocher, voici Monaco

Et derrière, Monte-Carlo.

Plus loin, Menton. Les oranges murissent ;

Les poitrinaires guérissent.

Un des deux vieux nous raconta

Des histoires d’assassinats

Dont ce drame-ci :

« Dans le train, un homme voyait son fils

Se pencher à la fenêtre pour s’amuser.

Sans cesse son père lui disait :

‘‘Hé ! prends garde, Mattéo,

Te penche pas trop,

Que tu pourrais t’attraper du mal, voyons !’’

Mais le garçon,

Comme il n’entendait point,

Ne répondit seulement point.

Alors son père le tira par le veston

Pour le faire rentrer dans le wagon.

 

Le corps tomba sur nos genoux.

L’enfant n’avait plus de tête sur son cou. »

 

 

 

 

 

 

 

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20 mai 2014 2 20 /05 /mai /2014 08:54

 

 

 

C’est vrai que….

…Tu vois… ?!

C’est émouvant.

Merci d’être là.

Déchiré

Boosté

C’est génial

Allumez le feu !

Arrête !

C’est classe !

Quelque part

Craignossss !

Y a pas d’ lézard

C’est cool !

Tu m’mets la pression

C’est un bon plan

Faire bouger les lignes

Au jour d’aujourd’hui

C’est énorme

T’inquiète !

Les chansons revisitées

Que du bonheur

Ça craint

T’es con ou quoi ?

On allait dans l’mur

C’est clair.

Voilà !

À plus !

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