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22 mars 2014 6 22 /03 /mars /2014 08:30

SAINT-ANTOINE

 

À Tourville, on l’appelait Saint-Antoine

Parce qu’il se nommait Antoine.

C’était un paysan de quarante ans

Joyeux farceur,

Vigoureux, bon vivant,

Insatiable buveur

Et soigneux de ses intérêts.

Il était connu dans toute la contrée.

 

Le 8 janvier, arrivait à Tourville

Un détachement de Prussiens.

 

Antoine soupait avec sa fille,

Quand entra le maire, maître Durand

Suivi d’un soldat allemand :

-« J’suis chargé de loger des Prussiens..

En v’là un qu’tu dois héberger.

Et surtout, pas d’blague. Tiens-toi bien.

Sinon, i’ vont t’fusiller. »

 

Le soldat était un gros garçon,

Aux yeux bleus, au poil blond

Qui semblait idiot mais bon gars.

-« Tiens, avale ça,

Sale chien ! »

-« Ya », répondit le prussien

Qui se mit à manger goulûment.

 

Saint-Antoine le resservit copieusement

-« Allons, fous-toi ça dans l’estomac !

T’engraisseras ! »

Puis Antoine trinqua avec le Prussien.

-« Chez toi, t’en bois pas du comme ça, hein ? »

 

Antoine ne sortait plus sans son Prussien.

Il le présentait à tous ses voisins :

-« R’gardez-moi s’il engraisse, c’t’animal-là !

Cré coquin, va ! »

 

Tous les jours, Antoine s’enhardissait.

Il lui pinçait les cuisses et disait :

-« Rien qu’du gras ! »

Il lui tapait sur les fesses en hurlant :

-« D’la couenne, tout ça !

Hein, sacripant ? »

Il l’enlevait dans ses bras de colosse :

-« I’ pèse plus d’cent kilos, c’te rosse ! »

 

Ils devinrent copains malgré tout.

Le Prussien accompagnait Antoine partout.

Un soir, Saint-Antoine acheta du fumier

À un fermier voisin, maître Marais,

En vue des travaux printaniers.

Il chargea le tombereau d’engrais,

Aidé par son Prussien.

 

En route, Antoine s’amusait à pousser

Son sale chien

Pour le faire culbuter dans le fossé.

Le soldat jura en allemand

Ce qui fit rire le paysan.

 

Mais bientôt le prussien se fâcha et le boxa.

Antoine le saisit et le renversa.

Le Prussien dégaina.

Antoine l’assomma.

 

Que faire à présent ?

Antoine sera fusillé par les Allemands !

Comment cacher le corps ?

Il tira le soldat par les pieds,

Le saisit à bras le corps

Et le hissa sur le tombereau de fumier.

 

Arrivé chez lui, Antoine fit basculer

Dans la fosse d’engrais

D’abord le Prussien, ensuite le fumier.

 

Vers minuit, le chien d’Antoine aboya.

Le fermier se leva et vit le soldat

Assis sur le tas de fumier.

-« Ah ! T’es pas mort !

Tu vas me dénoncer alors. »

Il prit sa fourche et lui planta

Les pointes d’acier

Dans l’estomac.

Puis il le balança dans la tranchée

Et le recouvrit de fumier pour le cacher.

 

Le lendemain,

Il alla trouver l’officier Prussien

Qui commandait le détachement

Pour connaître, disait-il, la raison

De l’absence de son soldat Allemand :

-« S’rait-t-i pas aller courir le cotillon ? »

 

À l’auberge de la ville,

La servante était jolie fille.

…En représailles, l’hôtelier fut fusillé.

 

Saint-Antoine était sauvé !

 


 

 

 


 

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