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19 décembre 2015 6 19 /12 /décembre /2015 09:05

Comment parler aux femmes…N°18/74

D’après ÉTRENNES (7 janvier 1887)

En cette fin d’année, alors que Vincent, un homme jeune et vif, faisait le bilan de ses maîtresses, les anciennes et les récentes, une sonnerie à sa porte le fit sursauter.

Au Nouvel An, on ouvre par charité, même à un inconnu.

Il tourna le verrou, tira la porte et aperçut Irène, sa maîtresse actuelle, pâle et tremblante. Elle entra, s’affaissa sur le divan et se mit à pleurer à gros sanglots.

-« Irène, qu’avez-vous ? …» Elle murmura :

-« Je ne veux plus vivre avec mon mari. Il m’a encore frappé tantôt. »

Vincent s’étonna. Il n’avait, à aucun moment, soupçonné cet homme du monde capable de brutalité.

Irène sortit alors un long déballage. Dès le lendemain de leur mariage, un premier désaccord naissait. Les jours suivants, les motifs de désunion se renforçaient. Puis sont venues les querelles multi-quotidiennes. Irène ajouta avec fermeté :

-« Je ne rentrerai pas à la maison. Puis-je rester chez vous ? Dites oui, je vous en prie. »

-« Vous allez commettre une irréparable sottise. Si votre mari veut vous quitter, mettez les torts de son côté de telle sorte que votre position dans la société reste respectable. »

-« Que me conseillez-vous …? »

-« Rentrez chez vous, et supportez votre mari jusqu’à la séparation de corps.»

-« C’est lâche ce que vous me proposez. »

-« Non, c’est raisonnable. Réfléchissez. Vous avez un nom à sauvegarder, des parents à ménager, des amis à conserver. Il serait idiot de gâcher tout cela. »

-« Eh bien, non. Je ne marche pas. C’est fini avec mon mari, vous comprenez ! »

Puis, les mains posées sur les épaules de Vincent, elle dit en le regardant fixement :

« M’aimez-vous, vraiment ? »

-« Mais, oui. »

-« Alors gardez-moi ! »

-« Vous garder ?...Chez moi ? ... »

-« Il faut me prendre ou me perdre. »

-« Ma chère Irène, divorcez et je jure de vous épouser. »

-« Dans deux ans, à la fin du procès, oui, …vous allez …peut-être m’épouser. Vous avez la tendresse patiente. »

-« Si vous ne rentrez pas chez vous, votre mari vous retrouvera. La loi et le droit sont pour lui. »

-« Je ne vous demande pas de me garder chez vous, mais de m’emmener n’importe où. Je croyais que vous m’aimiez mieux.…Je me suis trompée. Adieu ! »

-« Chérie, écoutez… » Vincent la retenait par la taille. Irène se débattait :

-« Laissez-moi, voulez-vous !»

-« J’ai une proposition raisonnable à vous faire : Partons demain pour Naples. »

Irène se leva et dit durement :

-« Non. Trop tard. Pas de dévouement ! »

-« Restez. Je vous ai parlé comme je le devais. Mais sachez que je n’ai jamais cessé de vous aimer. »

Radieuse, Irène embrassa Vincent et lui dit tout bas :

« Chéri, soyez assûré que mon mari ne s’est jamais douté de rien. Hier, comme étrennes, vous m’avez offert un magnifique bracelet. Je vous en remercie encore. Mais aujourd’hui, vous me gâtez mille fois plus avec celles que vous venez à l’instant de me donner. Dieu, que je suis contente ! »

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